Lions de Metal
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Suivi de la campagne Earthdawn des Lions de Pierre, 6ème saison.
 
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 Chapitre 55 - Bienvenue à Port-aux-Ruines

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Valérian
Éclaireur humain et questeur d'Astendar
Valérian


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Chapitre 55 - Bienvenue à Port-aux-Ruines Empty
MessageSujet: Chapitre 55 - Bienvenue à Port-aux-Ruines   Chapitre 55 - Bienvenue à Port-aux-Ruines Icon_minitimeSam 10 Déc - 9:39

Chapitre 55 – Bienvenue à Port-aux-ruines
 
 
D'habitude, à bord du Souffle de Thystonius, il n’y a que des trolls et ça me désole.
Cette fois, il y avait aussi trois jolies filles. Une triade forte différente de celle rencontrée lors de notre précédente aventure et qui risquait de me compliquer singulièrement la vie.
La première était Maloniel, ma future-ex, avec laquelle il fallait que j’ai une conversation des plus sérieuses. Histoire de lui dire qu’elle était géniale, que c’était fini entre nous mais qu’elle pouvait compter sur mon amitié. Un truc pas très intéressant à faire pour un questeur d’Astendar.
La seconde était Jessaëlle, la maitresse d’armes elfe qui n’était pas avare de sourires enjôleurs à chacune de nos rencontres à bord. Je sentais qu’il me faudrait rapidement mettre un terme au jeu de la séduction et lui dire que j’avais déjà une petite amie. Une autre conversation d’un intérêt limité.
Et la troisième était la princesse elfe Miraëlan. Une sorcière puissante. Une thérane de haut rang. Une femme amoureuse, pleine de tempérament et jalouse. Et aussi un spectre qui avait élu domicile dans mon esprit.
Bref, ce n’était ni le Bois de Sang, ni les ruines de Parlainth que j’appréhendais le plus pour le voyage à venir.

Peu après le départ, le nécromancien elfe Adanhedel demanda à me parler discrètement. Il me révéla qu’il avait connaissance de mes recherches relatives à un corps pour l’esprit de Miraëlan et m’informa d’éléments qui pouvaient m’intéresser. Selon lui, un maître d’armes t’skrang du nom de Lork Slytess revint des ruines de Parlainth, blessé et seul survivant de son groupe. Il appartenait à la Compagnie des Grandes Enjambées et relata ce qu’il avait vu, comme le font la plupart des explorateurs à Parlainth.
Parmi leurs découvertes, il mentionna un étrange laboratoire où étaient stockées des dizaines de cuves dans lesquelles flottaient des corps. Selon Slytess, les cuves étaient inviolées et non corrompues.
L’histoire était intéressante et méritait vérification. Miraëlan, qui n’avait rien perdu de l’entretien, ne cachait pas sa joie et son impatience et envisageait déjà de ramener plusieurs corps afin d’en changer à sa convenance, comme pour une garde-robe. Sachant qu’en ce bas-monde, tout se gagne de haute lutte et que les désillusions sont monnaie courante, j’étais loin de partager son enthousiasme. Mais nous tenions néanmoins une piste sérieuse et c’était déjà appréciable.
Je remerciai Adanhedel pour ces précieuses informations.
 
Afin de suivre les conseils d'Astendar, et pour connaître ma marge de manœuvre à ce niveau, je lançai une petite conversation avec ma princesse personnelle sur mes relations aux autres femmes.
«  Mira ? J’aimerais que nous parlions de certaines choses.
- À ta disposition, mon chéri. Parler – ou plutôt émettre des pensées – c’est tout ce que je peux faire… pour le moment, répondit-elle avec un sourire mental plein de promesses.
- Heu… oui. À ce sujet, compte tenu que tu avais apprécié la soirée avec Keleshane mais que ce n’était guère agréable pour la propriétaire du corps, j’avais envisagé d’autres possibilités.
- Oh ? Je t’écoute.
- Est-il possible pour toi de t’insérer dans un corps mais sans en prendre le contrôle ?
- Hum… je peux éventuellement partager les sens mais pas les sensations.
- Je ne vois pas bien la différence.
- Je saurai que tu auras les bras autour du corps que tu le serreras contre toi mais je ne ressentirai rien car je resterai un pur esprit. Si je ne possède pas le corps, ça ne sert à rien. Jouer l’espionne ne marchera pas… du moins pas pour cette activité-là.
- D’accord. Dommage… dès lors mon idée n’a plus grande intérêt.
- En effet, c’est tout ou rien. Mais si l’histoire de ton copain Adanhedel est exacte, nous n’aurons bientôt plus besoin d’intermédiaire.
- Si l’histoire est exacte, si les corps sont intacts, si on en trouve au moins un qui te plaise, si le transfert fonctionne bien. Bref, j’y croirai quand je le verrai.
- Allons ! Un peu d’optimisme, mon chéri. Broyer du noir n’a jamais fait avancer les choses.
- Certes. Tu as raison, ma belle.
- J’espère que tu le penseras encore plus lorsque j’aurai un corps, me taquina-t-elle.
Toute cette conversation n’était pas faite pour calmer mes sens qui – eux – étaient bien réels.
 
Pour le reste, j’avais eu tort de me faire du souci car tout se déroula sans heurt particulier.
 
Dès le départ, Jessaëlle fut informée qu’elle devrait donner un coup de main à bord du navire et aider les trolls et les sylphelins. La plupart ne comprenaient pas qu’elle soit libre alors qu’elle était alliée au dragon rouge qui avait attaqué le navire. Elle était tenue à l’œil et, soucieuse de se racheter, elle faisait de son mieux pour effectuer les tâches et ne rien commettre qui puisse susciter les reproches. Cela ne devait pas lui être facile car on me l’avait décrite comme d’un naturel assez fier. De fait, à chacune de nos rencontres, elle était soit accaparée, soit épuisée. Mais elle m’adressait son sourire à chaque fois qu’elle me voyait. Bon, tant qu’on en restait là, c’était plutôt agréable pour les deux. Et si elle était seulement sous le charme de mes vêtements, c’était gérable.
 
Je parvins ensuite à avoir une conversation privée avec Maloniel. Cette dernière était aussi curieuse que furieuse.
« Enfin ! Tu te décides à m’adresser la parole ! commença-t-elle en masquant difficilement sa rage.
- Effectivement. Je tiens tout d’abord à te présenter mes excuses car nous aurions dû avoir cette conversation plus tôt. D’une part, je n’étais pas prêt – c’était un peu confus dans mon esprit – et, d’autre part, les événements ne m’ont guère laissé d’occasion.
- D’occasion pour quoi ?
- Pour te dire que j’ai rencontré quelqu’un d’autre.
- Quoi ?!
- Maloniel, tu es une fille formidable et j’ai beaucoup apprécié les moments que nous avons partagés…
- Tu les as tellement appréciés que tu n’en veux plus !
Une note de désespoir se mêlait désormais à la colère.
- Je suis désolé. Je n’étais pas préparé à la rencontre avec cette autre femme et, depuis, je n’arrive plus à me l’ôter de l’esprit. Elle accapare mes pensées et j’ai l’impression qu’elle m’accompagne en permanence.
- Ah ! C’est très drôle ça ! intervint Miraëlan.
- Mira, s’il te plaît, pas maintenant !
- D’accord, je n’interviendrai plus. Je ne voudrais surtout pas t’interrompre, mon chéri, se moqua-t-elle avec un brin de cruauté.
- C’est à ce point-là ou tu me raconte des conneries pour te débarrasser de moi ? continua Maloniel.
- Non, c’est vraiment à ce point-là. Pourquoi te raconterais-je des conneries ?
- Parce que tu ne pensais pas que je viendrai à Vräss. Je soupçonnais déjà que tu avais une petite copine sur place et que moi j’étais juste « celle » de Throal.
- Tu es injuste avec moi, Maloniel. Mon histoire avec Carelia était finie avant notre seconde rencontre et je n’ai eu que toi ensuite. Il n’y avait personne d’autre jusqu’à mon retour du kaer Argovesia.
- C’est là-bas que tu l’as rencontré ?
- Oui, on peut dire cela.
- Et elle s’appelle comment ?
- Miraëlan…
- Une elfe, c’est ça ? Ça ne m’étonne pas ! Tu aimes tellement tout ce qui est elfe ! Quand on se promenait à Throal, tu n’avais souvent d’yeux que pour les objets elfiques… et pour les filles ! Tu sais que tu es humain, quand même ? Ça va mal finir votre histoire…
- On verra. Nous avons un peu de temps d’ici là.
- Et c’est elle qui te choisit tes nouvelles tenues ? On voit que quelque chose a changé chez toi. Ça me fait mal de l’avouer, mais ça te va très bien…
Une larme quitta ses yeux et dévala le long de sa joue. J’eus un geste de la main pour l’essuyer mais elle se recula vivement.
- Ne me touche pas, salaud !
- Malo…
- Et ne m’appelle plus comme ça !
- OK, je suis un méchant salaud. Tout ce que tu voudras. Mais si je ne peux plus t’aimer, je veux quand même t’assurer de mon amitié. Si tu as besoin de moi…
- Oui, j’ai besoin de toi ! Mais pas comme ami…, gémit-elle
- Je comprends, mais je ne veux pas te mentir ni te faire souffrir inutilement.
- C’est évident que là, je suis très heureuse… Laisse-moi !
- Très bien… à plus tard… Maloniel.  
  
Je me sentais un peu minable, mais c’était fait. En moins de dix minutes, j’avais détruit une relation que j’avais mis plusieurs moi à construire.
« Valérian ? Ça va ?
Mira, bien sûr.
- Je t’avoue qu’il y a des choses plus faciles à faire, répondis-je avec un peu d’hésitation.
- Je te remercie sincèrement pour cette belle preuve d’amour. D’autant plus que je sens que tu l’aimes encore un peu.
- Oui… c’est une fille très chouette…
- Ne t’inquiète pas, ça va passer. Et quand j’aurai un corps, je m’occuperai de te la faire oublier définitivement, répondit-elle avec entrain.
Elle avait certainement raison. Et une partie de moi le déplorait.
 
Histoire de me changer les idées, j’entrepris la lecture des parchemins que m’avait laissés Astendar. Ceux-ci parlaient des passions Astendar, Thystonius, Lochost et Upandal et vues par les orks, c’est-à-dire Mera-a-a-arg, Tranko, Blork et Jrikjrikjrik. Rien que les noms étaient déjà tout un programme.
Je pris le temps de lire attentivement les quatre textes, malgré un ennui croissant. J’en conclus que Kratis Gron était sans doute une ork atypique et exceptionnelle par bien des égards mais que tout le reste correspondait bien à l’idée que je me faisais du peuple ork. Des êtres ethnocentriques, aux pulsions primaires, qui ne raisonnaient qu’en termes d’affrontements. Ils ressassaient constamment leur passé d’esclave et étaient prêts à ravager Barsaive du nord au sud, d’est en ouest, pour prouver qu’ils étaient désormais indépendants. Dans leur tête, ils étaient toujours des esclaves qui se dressaient contre des maîtres qu’ils voyaient partout. Ils se disaient libres et fiers mais, de tous les peuples, ils étaient les plus faciles à manipuler. Du pain béni pour les Horreurs et leurs sbires.
 
Le second jour, je pris Ghorghor à part car j’avais besoin de ses talents d’armurier. Le joyau bleu trouvé dans le trésor de Vertecrête restait imperméable à mes tentatives pour en savoir plus. J’espérai que le nain aurait plus de succès que moi et que les choses pourraient enfin un peu progresser sur ce point. Je me fis la réflexion que je n’étais guère plus avancé avec le luth lui-même et qu’Andelin risquait de patienter encore longtemps compte tenu de mes maigres succès en deux ans.
Après trois bonnes heures d’examen attentif, Ghorghor détermina la nature des clés d’activation de plusieurs filaments, mais sans avoir les réponses. Il confirma également que la pierre bleue était bien en résonnance magique avec le luth. Toutefois, même ensemble, les deux objets formaient une trame incomplète et un ou plusieurs autres objets devaient également y être associés.
Ça, ce n’était certainement pas une bonne nouvelle et un soudain découragement m’envahit. Astendar aurait mieux fait de confier le luth à un elfe car ma vie d’humain ne suffirait sans doute pas à cette quête sans fin. Un peu dépité, je remerciai l’armurier nain pour son expertise et sortit pour dissimuler ma déception.
Miraëlan dû encore intervenir pour me remonter le moral et m’empêcher de sombrer dans un désespoir si familier et si tentant. Peut-être devrais-je aussi me trouver quelques corps pour pouvoir poursuivre cette fichue quête !
 
Le troisième jour, je profitai du calme pour développer mon talent de survie qui serait certainement mis à contribution dans les prochaines semaines. J’avais bien d’autres choses à faire évoluer mais le temps continuait à me fuir.
 
Le quatrième fut le dernier jour du voyage. Thregaz avait maintenu une allure réduite afin de pouvoir attribuer une partie de l’équipage aux dernières réparations. Les environs étaient tout sauf sûrs et le capitaine troll tenait à être prêt à faire face à toute situation avec un navire en bon état.
Nous arrivâmes à proximité de Port-aux-ruines mais, comme d’autres navires, nous nous posâmes bien avant la ville. Les abords étaient réservés au commerce avec le chef de la ville, Torgak. Sinon, il fallait payer un tarif d’emplacement plutôt dissuasif. Il resterait une demi-journée de marche à faire mais rien de bien méchant.
 
De loin, le Refuge ressemblait à un village accolé à une ville. En fait, Port-aux-ruines était bien une ville et Parlainth apparaissait gigantesque au fur et à mesure de notre approche.
So’tek sortit un livre de son barda et nous fit les présentations.
« La grande ville de Parlainth fut construite avec l’or et la sueur des Thérans il y a bien longtemps et marque l’extrémité nord-est de Barsaive. Avant le Châtiment, c’était la première capitale provinciale de l’Empire théran et la demeure du Grand gouverneur. À l’époque de sa gloire, l’opulence et la splendeur de Parlainth éclipsaient même celle de la Travar d’aujourd’hui.

Ce que nous savons de Parlainth nous vient surtout de l’exploration de ses ruines ainsi que des légendes et des histoires qui refont parfois surfaces dans les endroits les plus isolés de Barsaive. Pour protéger leur merveilleuse ville contre le Châtiment, les Thérans ne la transformèrent pas en citadelle comme la plupart des autres cités. Ils choisirent une autre méthode de protection et emportèrent la ville dans l’un des mondes inférieurs de l’espace astral. Ils effacèrent même tout souvenir de Parlainth de la mémoire des habitants de Barsaive, en pensant que c’était le seul moyen de la protéger contre les Horreurs.
Malgré cet exploit magique, les Horreurs parvinrent à retrouver la ville et à l’envahir. Elles détruisirent la légendaire Parlainth comme elles détruisirent nombre d’autres villes.

Après le Châtiment, la ville de Parlainth revint sur terre grâce aux efforts combinés de J’Role l’honorable Voleur et de Réléana l’Élémentaliste. Les ruines de la cité abritent nombre d’Horreurs et de créatures terrifiantes, mais elles cachent aussi d’innombrables trésors. La ville entière est un endroit sauvage à explorer et à apprivoiser, car dans les immenses tours et les douzaines de structures annexes souterraines, des myriades de créatures et de pièges guettent les imprudents.
 
Le Refuge se trouve à 21 jours de marche ou 13 jours de cheval de Throal. C’est une petite ville primitive qui se trouve dans la partie sud-est des ruines de la Cité oubliée de Parlainth. Les orks et les trolls menés par le célèbre chef troll Torgak fondèrent le Refuge il y a près de vingt ans, après avoir passé trois ans à explorer soigneusement une petite section des ruines de Parlainth. Après avoir nettoyé cette zone de tous les monstres et de toutes les Horreurs qui s’y trouvaient, les aventuriers établirent un camp permanent d’où ils pourraient mener de nouvelles expéditions. D’autres aventuriers en route pour la Cité oubliée commencèrent à s’arrêter dans cette zone sûre, appelée le Refuge, pour demander quelles portions de la ville n’avaient pas encore été explorées et découvrir les dernières informations à propos des monstres et des Horreurs qui vivent dans les ruines.

Torgak et ses compagnons finirent par abandonner leur chasse au trésor pour répondre à l’affluence des autres aventuriers. Ils rebâtirent donc une partie des ruines pour construire une auberge, La trolle pointilleuse, et une autre pour installer un comptoir appelé Aux Marchandises de Torgak. Comme les ruines sont impressionnantes, la Trolle et les Marchandises sont des bâtiments spectaculaires, dotés de hauts plafonds, de larges couloirs et des marches de marbre qui rejoignent la rue. Ils rivalisent de bien de manière avec les constructions du royaume de Throal, et leur opulence forme un contraste incongru avec l’air grossier et décati du reste du Refuge.

Le Refuge possède une population qui atteint tout juste le millier d’habitants, dont quelques douzaines de familles. Il y a autant de races différentes au Refuge qu’à Throal, et toutes vivent en bonne entente.
La plupart des ennuis sont apportés par les étrangers. Bien sûr, des étrangers arrivent constamment au Refuge et les risques de conflits abondent. Quelques années après que la population de la ville se fut stabilisée, d’autres personnes intéressées par les bénéfices que promet le Refuge reprirent la construction de la ville et l’agrandirent. Le premier quartier, construit à l’époque de Torgak, est maintenant connu sous le nom du Vieux quartier, bien que plusieurs sections de la ville soient antérieures. »
 
Nous décidâmes de créer plusieurs groupes pour entrer en ville afin de moins attirer l’attention et de conserver un certain anonymat. Selon dame Hautevoix, l’endroit recelait des espions thérans et elle était suffisamment connue pour être rapidement identifiée. Cela laisserait donc plus de latitude au second groupe. Un premier trio fut donc constitué de dame Hautevoix, Adanhedel et Maloniel. Un second trio de So’tek, Ghorghor et moi-même. Thregaz et Jessaëlle nous rejoindraient plus tard et formeraient une force d’appoint.
 
À peine arrivée, les gardes aux portes nous conseillèrent l’auberge de La Trolle pointilleuse. Alors que nous rendions à l’auberge, au niveau de la place centrale, nous ne pûmes manquer de voir une énorme dalle de pierre verticale. Celle-ci montrait un plan schématique à la peinture de Port-aux-Ruines et de Parlainth. Les dessins en blanc figuraient le niveau du sol et les étages, ceux en rouge concernaient les sous-sols. Tout cela semblait très indicatif, sans respect d’échelle. Toutefois, certains dessins ou noms très expressifs faisaient froids dans le dos. Un endroit charmant, vraiment. Et il faudrait sans doute crapahuter là-dedans pour trouver un corps à Mira.
J’en avais parlé aux autres et leur avait demandé leur aide. La plupart avec accepté sans hésitation et cela me mettait encore plus mal à l’aise. Avais-je le droit de risquer leurs vies juste pour donner un corps à ma passagère mentale ? Je ne doutais pas que Mira avait une réponse bien tranchée à ce sujet.
 
L’auberge de La Trolle pointilleuse était immense et l’ambiance plutôt animée. La patronne était une certaine Tylia, l’ancien bras droit de Torgak, le chef de la ville. L’accueil était très correct et le discours commercial bien rôdé. Les chambres étaient nombreuses et de configurations multiples. Nous optâmes finalement pour une petite suite pour quatre personnes. Nous découvrîmes alors que les prix également étaient tout aussi imposants que l’endroit. Il était souhaitable pour la bonne santé de nos finances que nous ne nous attardions pas trop sur place.
 
Une fois nos affaires déposés, nous allâmes faire une promenade en ville, histoire de voir les endroits les plus importants et prendre le pouls des lieux. Nous fûmes accostés par des représentants des deux compagnies d’exploration. L’officielle était celle de Torgak, l’Ordre des Loyaux Aventuriers mais une organisation concurrente existait, la société des explorateurs indépendants, et tous deux souhaitaient nous voir grossir la liste de leurs adhérents.
Le service d’ordre local, composé de trolls et d’orks, nous fit également les présentations et il était clair qu’on ne rigolait pas avec la sécurité publique dans le coin. D’un autre côté, vu le voisinage, il valait mieux éviter les conneries dans l’intérêt général. Avec des créatures qui utilisaient autant l’esprit de leur victime que leurs crocs, tout comportement suspect était rapidement réprimé.  
 
Nous nous rendîmes dans la boutique principale de la ville, Les biens et équipements de Torgak, située juste en face de notre auberge. Là aussi, l’endroit était immense, le lointain plafond était soutenu de colonnes de pierre monumentales. Les vendeurs et les clients étaient nombreux et l’endroit particulièrement bien achalandé. J’avais déjà entendu parler de cette boutique et je devais avouer qu’elle était à la hauteur de sa réputation, dans tous les sens du terme. Nous nous intéressions surtout aux potions et un vendeur nous prit en charge. Le choix était complet, le stock limité et les prix justes exorbitants. Après discussion avec So’tek qui était notre spécialiste es potions, les tarifs affichaient le double de ceux de Throal. J’en voulu soudainement à une certaine ambassadrice qui m’avait dissuadé de faire un détour par Brindol pour refaire notre stock. Je pris le strict minimum mais, vu ce qui nous attendait et que l’expédition pour trouver les cuves serait de mon initiative, il me faudrait certainement bientôt casser ma tirelire. Les autres en prirent également quelques-unes.
Une fois encore, Ghorghor entama un marchandage qui faillit nous coûter cher. Sa contre-proposition du prix était tellement ridicule que le vendeur, à juste titre, se sentit offensé et il fallut que j’intervienne pour éviter que nous ne soyons expulsés manu militari par le service d’ordre. Je parvins même à obtenir un petit rabais au passage, assez symbolique mais non négligeable vu la somme.
 
Nous retrouvâmes discrètement le groupe de dame Belisiel dans une autre auberge, à l’Héritage de Loak. La diplomate naine nous donna quelques informations sur la ville et nous proposa ensuite d’aller voir le mage Hiermon. Nous nous séparâmes de nouveau pour nous retrouver tous à l’endroit indiqué. Le mage habitait à l’étage d’une armurerie tenue par l’orke Brenula.
Hiermon était un humain âgé mais il avait encore de l’allant. Il nous accueillit dans son appartement encombré d’un fatras d’objets hétéroclites. Il nous informa d’emblée qu’il ne possédait pas encore le laisser-passer mais que cela ne devait plus tarder. J’en profitai pour l’interroger sur Syltess. Le mage ne le connaissait pas et nous conseilla de nous renseigner auprès de Brenula ou du nain Dag qui tenait un bazar à l’entrée du vieux quartier.
En redescendant, nous eûmes une rapide discussion avec Brenula. Au sujet de Slytess, elle nous envoya à La Trolle pointilleuse. Selon elle, le maître d’armes fréquentait souvent un troubadour t’skrang du nom de Sekra. 
 
Je poussai bientôt la lourde porte de l’auberge, suivi de Ghorghor et So’tek. À peine avais-je fait quelques pas à l’intérieur qu’un cri fusa, dominant le brouhaha ambiant.
« Valérian  ?! »
Je me tournai pour voir Taladar foncer vers moi, les bras largement ouverts en guise de bienvenue.
« Ça pour une surprise, alors ! Je savais cet établissement respectable mais je n’imaginais pas qu’il accueillait des héros tels que toi. Hé les autres ! Laisses-moi vous présenter mon ami qui est rien de moins que le célèbre Valérian, le chef des Tigres de Pierre de  Brindol !».
Avant que j’ai pu dire quoi que ce soit pour le couper dans sa diatribe, je fus traîné à sa suite et me retrouvait bientôt au centre de la salle centrale.
J’avais rencontré Taladar au début de l’année, lors du festival d’Astendar. Enthousiaste et bavard, ce troubadour, qui ne manquait pas d’un certain talent, m’avait déjà tenu la jambe durant tout le festival et voulait absolument devenir mon ami… et que le monde entier le sache. J’aurais surtout souhaité que mon plus grand fan ne soit pas un ork.
Par chance, la clientèle semblait déjà connaître Taladar. Ses envolées lyriques incessantes et ses déclamations à mon encontre ne rencontrèrent pas le succès escompté, la plupart des clients étant rapidement retournés à leurs propres conversations.
 
Histoire de le calmer et de ne pas le froisser, je convins avec lui, après le repas, de l’accompagner avec mon instrument pendant qu’il raconterait des histoires sur l’une des scènes de l’immense auberge. Taladar en fut ravi et, une heure plus tard, je dus m’exécuter. Je jouai de manière correcte mais sans plus et je crus m’en tirer à bon compte en faisant profil bas. Mais mon encombrant nouvel ami ne l’entendait pas ainsi et les histoires qu’il raconta étaient celles des aventures des Lions de Pierre… ou plutôt celles des Tigres de Pierre. Et je fus largement mis à l’honneur. Taladar exagéra de nombreuses choses dans nos aventures, ce qui finit par leur ôter toute crédibilité. Mais la crédibilité n’est pas un critère importante pour une bonne histoire et l’auditoire augmenta au fil de la soirée, et notamment l’auditoire féminin. À la fin de notre prestation, le piédestal que Taladar avait construit à mon encontre au fil de ses histoires et le pouvoir qui magnifiait ma tenue m’avaient attiré une demi-douzaine de jeunes femmes, plus ou moins séduisantes, dont j’eus beaucoup de mal à me défaire sans entacher ma légendaire galanterie. Je dus danser beaucoup, ce qui n’était en rien désagréable, et participer aux tournées successives lancées par Taladar en mon honneur. Là, je fus moins à mon avantage et la fin de la soirée fut assez floue ; je n’eu besoin d’aucune partenaire pour tournoyer à ce moment-là. Aidé par je ne sais plus trop qui, je parvins à notre chambre et je sombrai rapidement dans un profond sommeil.
 
Le réveil fut un peu nauséeux. Je me morigénai intérieurement pour avoir abusé de la boisson. Je savais que cela ne me réussissait pas et je faisais attention, d’habitude, à ne pas dépasser mes faibles limites en la matière. Il faut croire que l’attention soutenue de toutes ces filles m’avait ôté toute prudence. Ghorghor ne valait guère mieux mais So’tek était aussi alerte que d’habitude et son expression quelque peu moqueuse à l’encontre de mon piètre état n’améliora pas les choses.
J’allai faire quelques ablutions, espérant un léger mieux puis m’habillai. Au fil de mes déplacements dans la chambre que nous partagions, une étrange impression monta en moi. Comme quelque chose de trop évident pour que je le remarque d’emblée. Je fronçai les sourcils et commençai à fouiller dans la grande pièce meublée un objet qui aurait dû être en évidence sur mes affaires et qui était mon bien le plus cher. Après quelques minutes de recherches frénétiques sous les yeux étonnés de mes amis, je me tournai vers eux :
« Où est mon luth ? Vous l’avez vu ? »
So’tek fit un signe de dénégation de la tête avec une mine étonnée. Ghorghor se contenta de rentrer la tête dans les épaules et grimacer pour signifier que le volume sonore de ma question était en totale inadéquation avec son état. Je terminai de m’équiper à la hâte puis quittai la chambre pour interroger les autres clients et retourner la grande salle où je m’étais produis la veille, le tout dans un état de panique avancée et sous l’œil amusé du personnel.
Finalement, alors que mes amis arrivaient également dans la salle, je finis par trouver quelqu’un qui m’indiqua avoir vu quelqu’un sortir dans la rue avec un instrument. Trop perturbé pour poser les bonnes questions, je filai dans la rue, à la recherche d’un quelconque indice ou témoin.
 
Près de la roche de la carte murale, deux enfants déjà aperçus la veille jouaient là. Délaissant ces témoins que j’estimai peu fiables, je me lançai dans une des ruelles d’un pas frénétique et l’air hagard. Le cri de douleur d’un enfant puis celui de détresse d’une jeune fille stoppèrent net ma progression et dissipèrent en partie ma confusion. Le jeune garçon était à terre, juste devant la carte murale, et la fille, sa grande sœur, était penché vers lui, l’angoisse marquant ses traits.
Du coin de l’œil, j’avais aperçu le garçon toucher la pierre de la carte et je me doutai que la cause était là. So’tek était déjà en vision astrale et examinait attentivement la fresque. Il y décela bien vite une tâche de corruption.
Cet incident, qui mettait en danger l’existence d’enfants innocents, m’avait totalement fait retrouver ma lucidité et mes moyens. Le luth attendrait bien un instant. De toute manière, je n’avais aucune piste sérieuse et errer dans les ruelles comme un chien fou à la recherche d’un os perdu n’avancerait à rien. Ici, je pouvais être utile.   
« Mira ? Peux-tu examiner cet enfant et la carte murale et me dire ce que tu en penses, s’il te plaît ? »
Quelques instants passèrent pendant lesquels les badauds et les habitants du coin arrivèrent progressivement.
« Alors, mon avis est qu’une Horreur est à proximité, peut-être à l’intérieur de Port-aux-Ruines. En touchant la carte, le gamin a établi un lien avec elle et, désormais, elle se repaît lentement de son esprit.
- Bon sang, ce n’est pas une bonne nouvelle, ça !
- Tu voulais mon avis ou une jolie histoire ?
- Désolé du commentaire. Je te remercie pour ton efficacité.
- Très bien. Toujours à ton service, mon chéri. »
Je rapportai ces éléments à mes collègues et demandai à So’tek de filer chercher Hiermon. Il pourrait sans doute nous aider. Parallèlement, j’espérai secrètement que la présence d’une Horreur au Refuge était sans lien avec la disparition de mon luth, sans trop y croire tant la coïncidence était grosse. Si le luth était corrompu ou perdu, je ne pourrai jamais me le pardonner.
 
Les autorités arrivèrent bientôt pour voir ce qui perturbait l’ordre public, avec la ferme intention d’y mettre bon ordre. Par chance, l’un d’entre eux, une sorcière du nom de Dishara Œil-de-paille, avait quelques talents magiques et elle put vérifier nos dires. Sans cela, je pense que nous étions bons pour visiter les geôles locales.
Après discussion, les enfants s’appelaient Jasom et Jezra. Nous décidâmes de les ramener chez eux, accompagnés par Dishara. Nous arrivâmes devant une petite maison qui aurait eu besoin de quelques travaux mais dont l’intérieur était bien tenu. À la vue du corps inanimé de son fils, l’occupante des lieux manqua de défaillir. La femme avait la trentaine et conservait un certain charme, malgré l’usure d’une vie difficile en ces lieux inhospitaliers. Elle se reprit bientôt et fit preuve d’une indéniable force de caractère en nous questionnant sur les circonstances de l’incident.
Je retournai bientôt à l’emplacement de la carte murale pour y retrouver So’tek et Hiermon et les ramener à la maison d’Audra. Alors que le sorcier humain examinait Jasom, j’en profitai pour discuter un peu avec la jeune Jezra. J’appris bientôt qu’elle avait aperçu une t’skrang portant un instrument de musique s’éloigner discrètement de la carte. Mon espoir renaissait et j’avais enfin une piste. Je demandai des compléments de description sur cette t’skrang à la jeune fille toujours inquiète pour son jeune frère. Dishara, qui écoutait également la discussion, m’informa qu’il s’agissait sans doute de la barde Sekra. L’amie de Slytess ?
Je détalai vers l’auberge de la Trolle pointilleuse où j’interrogeai le personnel au sujet de la barde t’skrang. Apparemment, cette dernière était bien passée par l’auberge au matin. Contre une pièce d’or, j’obtins sans difficulté l’adresse de Sekra. En ressortant de l’auberge, je retrouvai So’tek et Ghorghor à proximité de la carte murale. Le nécromancien avait appris que Sekra était arrivée de Parlainth ce matin-même. De son côté, l’armurier nain avait découvert des indices près de la carte murale. Je mis rapidement mes talents à contribution et remontai la piste qui nous mena précisément à l’adresse de Sekra. Tout menait donc là.
 
Malgré les protestations de la propriétaire, nous pénétrâmes dans le bâtiment. L’intérieur était dans désordre avancé, poussiéreux. Sekra elle-même était dans un piteux état, ses habits étaient très défraîchis, presque moisis par endroit. Elle ne semblait pas avoir toute sa tête, comptait sans cesse des objets présents ou imaginaires, changeait de sujet brusquement, tantôt menaçante, tantôt apeurée. Elle semblait craindre un certain « clown ». Étrange.
Pendant que So’tek et Ghorghor interrogeaient la t’skrang, je fouillai l’endroit, à la recherche de mon luth. Je trouvai rapidement un luth mais c’était un instrument assez quelconque qui n’avait rien à voir avec le superbe objet réalisé par la sorcière elfe Larkspur. Jezra et les servantes auraient-elles pu confondre les deux instruments ? Possible. Aux yeux d’un profane, un luth en valait un autre. Je n’en continuai pas moins à fouiller l’endroit, déterminé à trouver un indice.
Je poussai soudain un cri de surprise et fis un saut en arrière : un énorme rat me fixai d’un regard malveillant, rouge et à la fixité de mauvais augure. Alerté par mon cri, les autres accoururent, y compris Sekra, et tous purent me voir porter un coup mortel à la créature. Le choc la fit exploser en morceaux, semant des pièces dans toute a pièce et la confusion dans mon esprit. La t’skrang m’injuria pour avoir détruit sa tirelire et récupéra prestement les quelques rubis et la monnaie qu’elle avait caché dans un rat empaillé. Un peu piteux, je me rendis compte que ma recherche frénétique avait altéré mon discernement, ce qui n’était pas bon signe pour un éclaireur.
Je décidai de revenir vers le groupe et me calmer alors que So’tek poursuivait son interrogatoire de la troubadour avec patience, détermination et psychologie. Au milieu de ses délires, il finit par apprendre que Sekra possédait encore une certaine volonté et qu’elle avait indiqué l’emplacement de l’Horreur sur la carte murale.
 
La troubadour était partie en expédition quelques jours plus tôt avec Slytess et d’autres. Elle-seule était revenue, et pas en bon état. L’Horreur avait tenté de la contrôler mais cela ne marchait sans doute pas aussi bien que la créature l’avait escompté.
J’orientai la conversation vers l’expédition précédente, celle où Slytess avait trouvé les cuves, mais sans obtenir grand-chose d’exploitable. Peut-être faudrait-il emmener la t’skrang avec nous à ce moment-là. Cette recherche des cuves m’apparaissait de plus en plus illusoire.
Nous quittâmes bientôt Sekra et la laissâmes à ses délires.
 
Perdus dans nos propres réflexions, nous retournâmes à la Trolle pointilleuse. Au comptoir, j’y trouvai un Taladar tout sourire qui me tendit mon luth. Mon luth ?! Je repris mon précieux instrument dans mes bras et remercia chaleureusement le troubadour ork. Je l’aurais presque embrassé de soulagement ! Il m’expliqua qu’il connaissait la mauvaise réputation de deux de mes soupirantes de la veille et il avait craint un mauvais coup à mon encontre. Il avait donc mis mon luth en sécurité dès que possible et m’avait ensuite raccompagné dans ma chambre alors que j’étais à peine conscient, plus drogué que ivre. Non content d’être mon plus grand fan, Taladar était aussi un vrai ange gardien. Je lui devais une sacrée chandelle !
 
Délivré du poids de la disparition du luth, je pouvais désormais me consacrer pleinement à l’expédition qui se montait pour aller neutraliser l’Horreur et libérer l’esprit du jeune Jasom.
Dans un premier temps, il nous fallait des renseignements et des moyens de financement. Grâce à Dishara, nous obtînmes rapidement un entretien avec Torgak. Ce dernier, bien conscient de l’intérêt de neutraliser cette Horreur, nous assura qu’il donnerait une petite récompense à ceux qui nous accompagneraient et nous recommanda auprès de Liniarg, la fondatrice de l’Ordre des Loyaux Aventuriers. Il nous conseilla également de rendre visite à Vardeghul, une érudite t’skrang qui possédait de nombreux écrits utiles pour ceux qui souhaitaient s’aventurer dans Parlainth.
 
Ghorghor alla chercher Thregaz et Jessaëlle. De mon côté, j’allai prévenir dame Belisiel de notre expédition. Adanhedel et Maloniel proposèrent immédiatement leur concours.
 
En soirée, j’attirai l’attention en proposant une tournée générale et en faisant une déclaration pour signaler que nous recherchions des volontaires pour une expédition dans les Spires afin de détruire une Horreur qui menaçait des habitants du Refuge. Je fis de mon mieux pour mettre en avant des motivations héroïques tout en plaçant ici et là des informations sur des préoccupations plus tangibles, tels une récompense de fin de mission offerte par Torgak et l’assurance de partager en parts égales les biens de valeurs trouvés lors de l’expédition. Ma prestation fut assez bien accueillie et nous eûmes un certain nombre de propositions. Nous tombâmes d’accord pour considérer que la plus sérieuse et la plus pratique était celle de la compagnie locale de la Légion du Crépuscule dont nous recrutâmes cinq membres après discussion avec leur chef, Flèche de feu, une élémentaliste sylpheline.
Peu après, j’accompagnai à nouveau Taladar et terminai ma prestation par une ballade héroïque sur notre expédition. Le texte était passablement bâclé mais l’émotion traversa l’assistance grâce à mon talent de chant émouvant.   
 
Le lendemain matin, je pus discrètement m’entretenir avec l’ambassadrice Belisiel. Il était convenu qu’elle retournerait nous attendre à bord du Souffle. Elle y serait en sécurité avec tous les trolls et sylphelins à bord. Elle avait toutefois demandé à avoir quelqu’un d’autre à bord avec elle et je lui suggérai d’insister pour conserver Maloniel à ses côtés. Je ne voulais pas qu’il arrive malheur à la jeune voleuse dans les Spires et je craignais qu’elle soit un peu fragile pour ce genre d’expédition. La diplomate naine entendit ma demande et y souscrivit. Mais elle demanda aussi à Jessaëlle de rester avec elle. La maîtresse d’arme n’était pas plus emballée que la voleuse mais elle ne pipa mot et suivit le mouvement.
Pour lui prouver ma confiance à Maloniel, je lui demandai de garder mon luth. Elle savait l’importance que l’objet avait à mes yeux, sans réellement savoir pourquoi, et elle acquiesça à ma requête avec solennité.
 
Nous allâmes ensuite chez Vardeghul pour y faire quelques achats. Elle proposait des parchemins susceptibles de nous intéresser mais il fallait payer pour voir. Et le prix augmentait avec les nombres de personnes qui seraient autorisées à y avoir accès. Avec So’tek, nous nous décidâmes pour une carte des Spires, « Une diatribe contre les simulacres », « Témoignages à propos de la chasseuse d’Horreurs » et « Sur un mur dans les Spires ». Le tout pour 273 pièces d’argent et avec signature d’un contrat nous tenant au secret du contenu des parchemins à l’encontre de tous ceux qui n’étaient pas expressément cités dans le contrat. Bref, Vardeghul savait préserver son fonds de commerce. Par ailleurs, les trois trolls chargés de sa protection - les frères Grobbak – n’incitaient pas à essayer de truander.
Nous retournâmes ensuite à la Troll pointilleuse pour y lire nos acquisitions. Toutefois, l’arrivée de Thregaz ne passa pas inaperçue. Pas mal de gens semblaient le connaître, dont la patronne et il fut accueilli comme le fils prodigue qui revient à la maison. Il semblait que « Le P’tit » avait pas mal traîné dans le coin vingt ans auparavant et qu’il s’appelait Shorlek du clan Jernez. Toutefois, Thregaz prétendait avoir dix-neuf ans. Donc, soit il avait un sosie à Barsaive, soit cette affaire renforçait la théorie avancée par Shaergraz, aussi fumeuse soit-elle.
Thregaz semblait assez mal à l’aise et il était clair que toutes ces histoires commençaient à l’énerver un brin. Il partit se coucher.
 
So’tek, Ghorghor et moi discutâmes un peu avec Flèche de feu, la chef de la Légion du Crépuscule locale. Son groupe connaissait un peu de secteur des Spires. Une zone trompeuse, incertaine et qui baignait dans une brume glaciale qui dissimulait bien des choses dangereuses. Contrairement aux autres zones de la ville, les Spires était relativement intacte, comme si les habitants avaient fui la veille. Il n’y avait pas de clans particuliers et on pouvait tomber sur à peu près n’importe quoi.
Nous étudiâmes ensuite les parchemins achetés à Vardeghul. Le plan pourrait avoir son utilité mais seulement lorsque nous saurons que nous sommes dessus. « Témoignages à propos de la chasseuse d’Horreurs » et « Sur un mur dans les Spires » étaient de portée générale et ne renseignait que sur la roublardise des Horreurs et sur le fait que l’une d’entre elle chassait les autres. Intéressant mais de peu d’intérêt dans notre situation.
« Une diatribe contre les simulacres » évoquait des créatures animées, de tout type de matériau. Nous en avions déjà rencontré dans la kaer Argovesia. Après une petite discussion avec ma sorcière personnelle, il s’avérait que ce genre de création était ensuite autonome et qu’un sortilège d’antimagie ne suffirait pas à s’en défaire. Les simulacres de paille ou de glaise semblaient assez peu dangereux, indépendamment du nombre, mais il en irait tout autrement si nous tombions sur des simulacres de pierre ou de fer. Je décidai de faire l’acquisition de trois pioches, au cas où, malgré les gémissements d’agonie de ma bourse.    
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Chapitre 55 - Bienvenue à Port-aux-Ruines
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